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L’expérience de Maxime Dumont

Maxime Dumont
Ingénieur ICAM Lille
Promotion 102


Un petit rapport pour vous expliquer ma mission de volontariat (AFVP) en Haïti et pour vous remercier de votre participation et de l’intérêt que vous portez à mon projet.

     
   
     
   
     


Je suis en Haïti depuis plus d’une année maintenant. Je travaille dans le département du Sud, dans la commune de Camp Perrin. La grande richesse de cette zone est le canal d’Avezac, qui fut construit par les colons et qui irrigue une bonne partie de la plaine. J’ai la chance aussi d’être dans une région relativement calme et presque épargnée par les troubles et violences qui sévissent dans la capitale Port-au-Prince ou aux Gonaïves malgré la présence de la force internationale composée principalement de militaires des pays d’Amérique latine.


Je travaille dans une association, les Ateliers École de Camp Perrin, dont l’objectif premier est la formation d’artisans afin qu’ils puissent un jour être indépendants et avoir leur propre petit atelier pour une fabrication spécifique. Il a été crée, il y a plus de 25 ans par un Belge, Jean Sprumont, une personne exceptionnelle. Un volontaire français, Sébastien, s’occupe de l’administration et de la gestion des projets et un volontaire Suisse, Christophe, est ingénieur avec une formation assez proche de la mienne.


On compte aujourd'hui’hui une vingtaine d’artisans installés, fabrication de charrues à traction animale, brouette, réchauds à gaz, lames de ressort, moulin à maïs, pompe à godets …. Cette année, boss Jean a été installé dans son atelier de mécanique automobile et Junot dans son atelier d’électricité.


La formation se fait “sur le tas” en fonction des commandes et des fabrications. L’atelier se veut autonome financièrement et compte une vingtaine d’artisans employés et apprentis. Autant vous dire qu’actuellement la situation est délicate car l’économie du pays est au ralenti et les gens qui en auraient le pouvoir n’investissent pas.
Nous travaillons avec une ONG belge, CODEART (Coopération au développement de l’artisanat www.codeart.org), qui s’occupe de nous fournir les matières premières introuvables en Haïti, les machines-outils dont nous avons besoin et qui développe aussi des prototypes de fabrications (moulin à canne à sucre, bélier hydraulique, séchoir à fruits…).


Cette année, nous avons sorti nos premiers moulins à canne, motorisés et à traction animale. Ils ont un taux d’extraction de 70 % (pour 10 kg de canne passée, 7 kg de jus), ce qui est un réel progrès par rapport aux 40 % des installations traditionnelles en bois. La bagasse (canne broyée) est ainsi beaucoup plus sèche et prête à brûler dans les chaudières pour transformer le sirop de canne en rapadou. Nous allons également présenter un projet pour obtenir les financements nécessaires à la fabrication et à la distribution d’équipements pour la transformation de la canne (chaudières, grilles, portes de four…).

     
     
Moulin à canne à traction animale
 
Moulin à canne motorisé


Depuis mon arrivée, nous avons le projet de créer un atelier pour la fabrication, l’entretien et la réparation de micros turbines hydrauliques. Pour cela, nous travaillons avec un expert belge, Jean-Luc Willot, fabricant des turbines JLA. Il a passé 4 mois avec nous l’année dernière et va revenir en mars. Durant son absence, c’est moi qui prends le relais. Il faut fabriquer des modules des pièces en bois, les mouler dans le sable et les couler en fonte (car nous disposons d’une fonderie à induction), puis les usiner (raboteuse, tour, aléseuse, fraiseuse). Ce projet me passionne et j’ai hâte de sortir la première turbine, qui devrait normalement équiper un site près de Port-au-Prince (60 kW). Nous apprenons énormément de choses grâce à ce projet.

Tournage du rotor
Alésage des faces
Rabotage profil
La turbine JLA
Coulée des pièces


Fabriquer des turbines et Équiper des sites est une chose, la bonne gestion par la communauté rurale bénéficiaire en est une autre. Il y a donc aussi tout un travail de formation et de sensibilisation.
Toujours dans le domaine de la micro électricité, nous avons réparé une  turbine alimentant un hôpital. Nous avons usiné le palier en babit (matière anti-friction) et mis un roulement à la place puis rectifier l’axe directement sur la turbine.

     
Usinage du palier


Nous avons Également réalisé une grosse commande pour l’Électricité d’Haïti. Il s’agissait de fabriquer 50 bielles et 100 biellettes qui servent au système de régulation de 3 grosses turbines (2.4 MW) qui alimentent partiellement Port-au-Prince. Une bonne partie de l’atelier à été mobilisée durant 2 mois, c’Était une très bonne expérience aussi bien pour l’apprentissage que pour l’image de marque de l’atelier.

Bielle brute de fonderie
Les pièces finies
Les pièces installées


Nous avons développé 4 modules de béliers hydrauliques. C’est une pompe automatique fonctionnant … à l'eau, c'est-à-dire sans apport d'énergie extérieure. Il utilise l'Énergie d'une chute d'eau pour relever une partie de cette eau à une hauteur supérieure à la hauteur de chute. J’ai étudié la possibilité d’implantation sur 3 sites, tout est prêt, mais malheureusement les fonds nécessaires aux communautés ne sont pas encore débloqués.

Schéma de principe
Le bélier


Une autre nouvelle fabrication a vu le jour, l’extracteur à miel, conçu par moi-mème. On introduit les cadres remplis de miel et grâce à la force centrifuge, le miel est éjecté sur les parois en inox. Les paliers sont en matière polymè?re, pas de billes, donc pas de graissage.

L’extracteur
. pieds réglables
. robinet spécial
Le système de renvoi d’angle
Les cages pour les cadres


Le dernier projet en cours, et pas le moindre, est l’équipement de 3 ateliers dans le Nord du pays, avec 2 fonderies. Il y a là un énorme potentiel car les “boss” sont très compétents mais sous-équipés et se débrouillent toujours avec les moyens du bord. Ce projet, financé par l’Union Européenne, vient de commencer par la construction du bâtiment pour le premier atelier. Suivra ensuite une longue série de formations des artisans directement chez nous, puis l’acheminement des machines et leur installation. Les fonderies permettront de couler toutes sortes de pièces, notamment pour la réparation des vieux moulins à canne, trés nombreux dans la région du Nord.

Boss Antoine au Cap Haitien
Le cubilot à réhabiliter
Boss Mélès à Pignon
La devise…
Boss Morel à Terrier Rouge


Il est prévu dans ce projet d’intégrer un volontaire pendant 2 ans, pour lancer le projet, coordonner les différents ateliers, organiser les formations et régler un tas de problèmes ! Un ingénieur ICAM serait particulièrement bien adapté pour ce poste. Dans un prochain mail, je vous enverrai la fiche de poste et les démarches à suivre pour le recrutement pour que vous le fassiez circuler dans les 3 Écoles.


En venant ici, je voulais mettre mes compétences au service de gens qui en ont besoin et me rendre utile, concrètement, à des personnes, et non pas à un système ou à une Économie. Je pense que je le suis, quotidiennement dans mon travail. Ça passe par de petites choses, et doucement…


Je travaille beaucoup dans l’atelier sur les machines, dans la graisse car ici, en Haïti, le travail manuel est considéré comme “dévalorisant” et c’est important que les gars voient qu’un blanc peut se salir les mains ! J’essaie de faire passer l’amour du travail bien fait et la fierté de ce qu’on peut réaliser. Tout un travail aussi de responsabilisation, je ne donne jamais un plan sans rien expliquer, on se réunit, on en parle et on décide ensemble car chacun peut apporter des bonnes idées et son expérience. Chacun peut créer et laisser s’exprimer son imagination mais ce n’est pas facile, il faut avoir confiance en soi et y croire.


D’un autre coté, j’apprends énormément de choses, dans de nombreux domaines et pour cela je remercie ma formation qui a pu me donner les bases nécessaires, la curiosité d’apprendre et la faculté d’adaptation et d’analyse. Mon travail est effectivement très diversifié : beaucoup de mécanique mais aussi hydraulique (bélier et turbines), topographie (repérage des sites), matériaux (fonderie et traitements thermiques), conception… et une bonne dose de relations humaines !


Haïti est un pays complexe, et je n’ai pas fini de le découvrir !
Encore un grand merci pour votre attention.


Vous pouvez suivre quelques nouvelles assez régulièrement sur mon site http://membres.lycos.fr/maximedum

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